Thursday, May 12, 2005
Antar, Oedipe et les autres
Ma soeur a passé plusieurs années dans quelques pays du proche et du moyen orient. Dans cette région, il y a beaucoup de gens très pauvres qui se servent toujours des animaux comme moyen de transport et pour gagner leur vie. Souvent la frustration d'un peuple devant l'injustice de la pauvreté ou de l'oppression politique, crée une situation où ils deviennent eux mêmes les oppresseurs des autres. Les victimes peuvent être des femmes ou des enfants. Elles peuvent aussi être des animaux. Ma soeur était très sensible à cette situation mais ne savait pas quoi faire, ni pour les gens ni pour leurs animaux. Le jour où elle a acheté tous les melons d'un vendeur, parce que le poids était visiblement trop lourd pour le petit âne qui les portait, elle a eu une grande déception: une demi-heure plus tard le vendeur était de retour avec de nouveaux melons, et l'âne était aussi chargé qu'avant.
Quand je suis arrivée chez elle à Jérusalem, elle gardait un âne dans son jardin. Il avait été sauvé par une amie qui roulait en voiture entre Jérusalem et Tel Aviv. Il faut préciser que cette histoire se passe il y a trente ans, avant les Intifada et les murs de beton. L'amie, une étrangère comme ma soeur, a remarqué des adolescents qui jouaient avec un poulain au bord de la route. Deux étaient montés sur son dos, et les autres le frappaient pour qu'il avance. L'animal était trop jeune pour porter du poids, et il allait s'écrouler. Je ne me souviens pas comment la femme a pu prendre possession de lui, sûrement après avoir payé un bon prix. Je sais seulement qu'elle est rentrée à Jérusalem avec un âne dans sa voiture, et que c'était ma soeur qui lui a fourni gîte et couvert. On l'a appelé Antar.
Il était noir et beau et vif, et chaque jour il grandissait un peu plus. La cour d'une vieille maison de Jérusalem Est ne pouvait plus lui suffir. Il a été convenu qu'Antar irait vivre dans le village de Mahmoud, et en échange pour quelques travaux dans les champs il pourrait manger à sa faim et dormir dans une étable propre. J'espère qu'Antar a pu vivre quelques années heureuses, avant que l'Histoire (avec un grand H) ne s'interpose entre lui et sa fin heureuse.
Un jour, je marchais dans la rue près de la vieille ville. Il faisait chaud. Des enfants, assis devant une maison, mangeaient des glaces à l'eau. De temps en temps un des enfants étendait sa glace pour qu'un petit chat pourrait la partager, mais dès que le chat essayait de l'attrapper, la glace était retirée, et les enfants s'éclataient de rire. Je n'allais pas m'arrêter, parce que les enfants ne faisaient pas de mal, en plus, je rentrais du travail, j'étais fatiguée. Puis j'ai remarqué que le chaton ne pouvait pas se déplacer: ses pattes de devant étaient liées avec du fil de cuivre. Pour cet animal aucun argent a changé de main, je l'ai attrapé et j'ai couru tout le long de la route de Nablus. A la maison on ne pouvait pas enlever le fil, il avait été en place depuis longtemps et coupait dans la chair des pattes. Un ami a proposé de m'emmener avec le chat chez un vétérinaire. Cet homme ne conduisait pas, il se déplacait toujours avec un chauffeur. Donc, le petit chat de la rue, comme Cendrillon, est allé au bal dans une belle voiture. Sauf qu'il n'est pas allé au bal, mais au monastère de Ratisbonne, où vivaient des moines allemands. C'était dans cet endroit que le vétérinaire recevait ses patients. Mon nepheu, qui apprenait le grec à l'école, a tout de suite baptisé le chat Oedipe, qui veut dire pieds douloureux. Cependant, il était bientôt évident qu'Oedipe était une fille, ce qui n'était pas grave, on l'a appellée Eddie.
Et les autres? Tous les chats de la rue d'Israel, pour qui je n'ai rien fait parce que je ne savais pas quoi faire, le problème étant trop énorme. Tous les ânes trop petits pour leurs fardeaux trop grands. Tous les chevaux squelettiques tirant des carrioles trop chargées. Pour eux, il existe une association qui s'appelle Concern for Helping Animals in Israel (CHAI), et leur site web est http://www.chai-online.org/
Faites un tour sur ce site, vous verrez des histoires atroces, dont quelques unes finissent bien. Il y a même un projet pour un refuge pour les ânes et les chevaux. Espérons que cela deviendra vite une réalité, car ces animaux attendent déjà depuis combien de milliers d'années?
Quand je suis arrivée chez elle à Jérusalem, elle gardait un âne dans son jardin. Il avait été sauvé par une amie qui roulait en voiture entre Jérusalem et Tel Aviv. Il faut préciser que cette histoire se passe il y a trente ans, avant les Intifada et les murs de beton. L'amie, une étrangère comme ma soeur, a remarqué des adolescents qui jouaient avec un poulain au bord de la route. Deux étaient montés sur son dos, et les autres le frappaient pour qu'il avance. L'animal était trop jeune pour porter du poids, et il allait s'écrouler. Je ne me souviens pas comment la femme a pu prendre possession de lui, sûrement après avoir payé un bon prix. Je sais seulement qu'elle est rentrée à Jérusalem avec un âne dans sa voiture, et que c'était ma soeur qui lui a fourni gîte et couvert. On l'a appelé Antar.
Il était noir et beau et vif, et chaque jour il grandissait un peu plus. La cour d'une vieille maison de Jérusalem Est ne pouvait plus lui suffir. Il a été convenu qu'Antar irait vivre dans le village de Mahmoud, et en échange pour quelques travaux dans les champs il pourrait manger à sa faim et dormir dans une étable propre. J'espère qu'Antar a pu vivre quelques années heureuses, avant que l'Histoire (avec un grand H) ne s'interpose entre lui et sa fin heureuse.
Un jour, je marchais dans la rue près de la vieille ville. Il faisait chaud. Des enfants, assis devant une maison, mangeaient des glaces à l'eau. De temps en temps un des enfants étendait sa glace pour qu'un petit chat pourrait la partager, mais dès que le chat essayait de l'attrapper, la glace était retirée, et les enfants s'éclataient de rire. Je n'allais pas m'arrêter, parce que les enfants ne faisaient pas de mal, en plus, je rentrais du travail, j'étais fatiguée. Puis j'ai remarqué que le chaton ne pouvait pas se déplacer: ses pattes de devant étaient liées avec du fil de cuivre. Pour cet animal aucun argent a changé de main, je l'ai attrapé et j'ai couru tout le long de la route de Nablus. A la maison on ne pouvait pas enlever le fil, il avait été en place depuis longtemps et coupait dans la chair des pattes. Un ami a proposé de m'emmener avec le chat chez un vétérinaire. Cet homme ne conduisait pas, il se déplacait toujours avec un chauffeur. Donc, le petit chat de la rue, comme Cendrillon, est allé au bal dans une belle voiture. Sauf qu'il n'est pas allé au bal, mais au monastère de Ratisbonne, où vivaient des moines allemands. C'était dans cet endroit que le vétérinaire recevait ses patients. Mon nepheu, qui apprenait le grec à l'école, a tout de suite baptisé le chat Oedipe, qui veut dire pieds douloureux. Cependant, il était bientôt évident qu'Oedipe était une fille, ce qui n'était pas grave, on l'a appellée Eddie.
Et les autres? Tous les chats de la rue d'Israel, pour qui je n'ai rien fait parce que je ne savais pas quoi faire, le problème étant trop énorme. Tous les ânes trop petits pour leurs fardeaux trop grands. Tous les chevaux squelettiques tirant des carrioles trop chargées. Pour eux, il existe une association qui s'appelle Concern for Helping Animals in Israel (CHAI), et leur site web est http://www.chai-online.org/
Faites un tour sur ce site, vous verrez des histoires atroces, dont quelques unes finissent bien. Il y a même un projet pour un refuge pour les ânes et les chevaux. Espérons que cela deviendra vite une réalité, car ces animaux attendent déjà depuis combien de milliers d'années?